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Quelle importance à l’art pour moi ?

Aix-en-Provence. 10 mai 2004.

13 présents : 12 de l’équipe + 1 régional.

§          Le mot latin "ars" signifie technique, habileté, et vient d'une racine indo-européenne signifiant "adaptation", "ajustement". On a rangé sous cette dénomination aussi bien la grammaire que la rhétorique, la dialectique, l'arithmétique et la géométrie… Mes souvenirs d'enfance, avec des parents peintres m'ont révélé à quel point une œuvre peut exprimer une personnalité.

§          L'architecture me paraît typique d'un art à base scientifique, et quand on voyage on constate à quel point elle peut révéler la personnalité d'un peuple. L'art détend mon esprit et la pratique des encadrements me donne du plaisir. L'artiste me semble le modèle de la liberté.

§          Au festival d'Avignon j'ai été frappé par la qualité artistique de sculptures assemblées que leur auteur exposait dans la rue, alors qu'au musée de Strasbourg j'ai été ahuri par la nullité des œuvres. J'ai un faible pour Brancusi.

§          Je suis peu sensible à la sculpture et à la peinture, mais j'aime le théâtre et surtout la musique. Privé de piano pendant plus de dix ans, j'ai très mal vécu cette frustration. Comme si j'avais été amputé d'un membre par lequel je peux exprimer peine et douleur mais aussi la joie. Je joue pour moi, seul avec mon "instrument-confident", avec liberté et plaisir… à condition que personne n'écoute !

§          On dit que "des goûts et des couleurs, on ne discute pas". Pourtant le goût s'éduque, et l'éducation artistique fait progresser. C'est ainsi que je me suis initié à l'art baroque, à Rome et en Bavière, dont j'ai appris l'histoire et l'évolution, et dont la constante est le rôle du mouvement. La musique contemporaine gagne à être vue en même temps qu'écoutée. L'art est une aspiration de l'âme. Il est partout, mais il faut être réceptif et cette sensibilité à l'art dépend aussi du moment.

§          Je suis sensible à la beauté, même dans les domaines où je n'ai pas de formation artistique, et j'aime jouer en public : on fait plaisir en se faisant plaisir. Le musée de Grenoble est plus beau que les œuvres qu'il renferme (ex. : une toile entièrement blanche, remplie de cercles au trait noir). Je réagis si je peux discerner quelque chose. Sinon…

§          L'art est pour moi le résultat de la maîtrise d'une technique. La littérature expliquée au Lycée me laissait de marbre, mais j'aime l'architecture et tout ce qui est technologique. Je suis sensible à la musique et les peintres qui me paraissent les plus faciles à apprécier sont les impressionnistes. J'ai longtemps privilégié les cathédrales gothiques au détriment de l'art roman, avant de modifier mon jugement.

§          Je suis fils de peintre et conscient de l'importance du "ressenti" face à une œuvre d'art. Celle-ci me paraît reposer sur un équilibre mathématique (le fameux nombre d'or) et, étant équilibré moi-même, je me retrouve dans l'œuvre admirée. Tout ce que j'aime est-il artistique ? Le ressenti est-il le seul critère ? La compétence de celui qui regarde, sa conscience de la qualité technique de l'œuvre entrent aussi en ligne de compte. L'art n'est pas seulement ce qui touche, et il arrive qu'on se lasse d'un tableau qu'on a aimé.

§          Je n'ai pas eu d'éducation artistique ; à la maison il n'était question que de mécanique, de bateau et d'avion… jusqu'au jour où j'ai découvert le talent d'un de mes frères à la guitare. Je crois qu'il n'y a pas que la technique : l'art révèle la personnalité. J'aime le cinéma et j'ai pu juger la différence qui sépare un vrai film d'un film d'amateur. J'ai découvert la sculpture au Louvre et au musée Guimet. Sans être connaisseur, je ressens. A propos des intermittents du spectacle, je ne voudrais pas être à la place des décideurs: comment juger du talent ?

§          Mon père était passionné par le nombre d'or. Je m'efforce de donner une éducation musicale à mes enfants et de les sensibiliser à la beauté. Je suis particulièrement attirée par le théâtre et la danse ; dans la pratique de mon métier de psychiatre, il m'arrive d'avoir l'impression de faire une œuvre d'art…

§          Jeune, je m'évadais par la lecture. Fuir le monde, et en même temps le retrouver… Je suis un consommateur de l'art. J'ai évolué dans mon goût pour l'œuvre de Picasso jusqu'à apprécier toutes les époques du peintre. Il faut faire des efforts et avoir ainsi davantage de plaisir. L'histoire de l'art permet d'aller au-delà du ressenti.

§          Ma famille était pauvre, mais nous avions un piano à la maison, et ma mère en jouait. L'art est une rencontre, et c'est ce que j'ai éprouvé dans le chant.

§          A la différence de la plupart d'entre vous, je n'ai pas eu (pas voulu avoir, aussi…) de formation scientifique et me suis consacré très tôt à la littérature et à la musique. Celle-ci était pour moi, adolescent, une véritable drogue. Mais j'étais paralysé, dans la pratique instrumentale, par la présence d'un "autrui", quel qu'il soit, et trente ans de carrière (locale) de pianiste et de claveciniste ont été gâchés par le trac. Il faut, je crois, distinguer trois niveaux : le créateur, l'interprète et le consommateur. En France, on a tendance à idolâtrer le créateur. Malgré toute l'admiration que j'ai pour les grands créateurs artistiques, qui sont vraiment des bienfaiteurs de l'humanité parce que leur œuvre nous apaise et nous rend meilleurs, je ne crois pas que Schubert puisse remplacer Dieu, dont sa musique est pourtant si proche mais je crois que les consommateurs que nous sommes… pourraient consommer plus !!