DÉPASSER LES LIMITES ? POURQUOI ? JUSQU’OÙ ?
Grenoble, 5 février 2015
11 participants
Dans ma vie j’ai été exclu de toutes les institutions. Deux fois de l’industrie, de l’Antarctique… Exclu de la paroisse Saint Jean, de l’Église par le mariage, de l’armée où j’ai connu les prisons. Indiscipliné, mais bon élément. Je disais tout haut ce que les autres n’osaient pas dire. Chez Allibert, j’ai osé parler au directeur et j’ai été viré immédiatement. Dans ma vie si je dis un mot, ma vie bascule. J’ai appris à être plus prudent. Il m’est arrivé de dire à mon, chef de labo : « Tu fous la merde… ». À propos de Charlie, on peut franchir les limites s’il y a de l’humour. L’évêque, il me semble aller au-delà de ses propres limites. Pour certains musulmans, je vais au-delà de certaines limites quand je les interpelle sur Mahomet, et si je leur dis : « Arrêtez les conneries. »
J’étais plutôt obéissante, même si impulsive. Avec les enfants, et étudiants, parfois un peu trop raide. Mais c’est avec ceux qui transgressent que ça progresse. Dans mon travail, j’avais l’impression d’être au-delà de ce que je savais, je n’étais pas à l’aise, et maintenant je me restreins dans ce que je sais faire. Dans ces réunions, je me sens accueillie, mais embarrassée de vous écouter sans dire grand-chose, j’ai l’impression de profiter.
Franchir les limites, c’était me marier avec un prêtre. Je n’osais pas le dire à ma famille. Quand mon mari ramenait le débat sur l’Église, ma sœur religieuse avait peur et lui disait : « Va te reposer… ». Dans la période communiste, on n’osait pas parler, on n’osait pas dire.
Par nature, je suis disciplinée, mais dans les discussions il m’arrive de monter, monter… Cela vient de ma famille, cette difficulté à discuter. Sur la contraception, le divorce, je suis outrée par la position de l’Église. On doit aller au-delà de ces limites.
Oui, aller au-delà de cette régulation de la vie du couple. J’ai ma conscience, je n’ai pas de problème avec les limites extérieures. J’essaie de comprendre les positions des uns et des autres. Je reste fidèle au message de Jésus-Christ, pas aux diktats de l’Église. Les limites sont celles de ma personne. J’ai une admiration pour ceux qui transgressent les limites, mais je ne me sens pas appelé à faire ça. Les caricatures, ça ne me parle pas, le monde est trop vaste. Mais je suis content que certains disent « stop », pour faire avancer les choses. S’engager, oui, mais prendre des positions sur Internet, ce n’est pas s’engager, on ne risque rien.
Les limites pour moi sont physiques. J’ai la chance que les facultés intellectuelles ne soient pas atteintes. Pour les facultés physiques, soit on ne fait rien, soit on transgresse. Je suis tombé sur un kiné qui m’a appris à dépasser mes limites, et je progresse très nettement, pour la marche, pour les autres, pour moi-même.
Je voyais plutôt les limites de la loi. La contraception, les « lois » de l’Église : j’ai transgressé volontiers, pour ce qui me convenait, selon mon propre jugement. Les lois sont un idéal, et quand cela ne me convient pas, je transgresse volontiers, quand cela ne gêne personne, c’est ma règle. Les caricatures : si je les trouve choquantes, blessantes, je ne comprends pas. Le respect de la personne est primordial.
Je suis assez disciplinée. Dans la famille, je restais dans les clous. Papa m’avait inculqué que le respect de la loi est une façon de vivre ensemble. Je suis malheureuse de voir la transgression, au cinéma par exemple. Pour le vivre ensemble, je respecte les limites. Mais je conçois qu’on doive transgresser parfois, dans un pays en guerre par exemple.
Je n’ai pas l’impression d’avoir transgressé. Peut-être sous le coup de la colère, j’ai envoyé balader mon responsable. Et puis ça a été bien ! Ou une autre fois, mais plutôt résistance que franchissement de limites, plutôt par accident.
Si la loi ne me semble pas adaptée, si je ne la trouve pas juste, ce n’est pas pour moi. Mais je ne suis pas dans l’affrontement, mais plutôt dans la conciliation, sans éclat. Sauf une fois avec mon directeur de thèse qui m’avait donné rendez-vous et fait attendre de façon inacceptable. J’ai attendu qu’il vienne… Il faut se faire respecter, comme femme, enfant… J’ai transgressé sans état d’âme quand je considère que la limite n’est pas juste. Mais pas au point de faire mal à une personne, quand ça va trop loin ou manque de respect pour une personne.