AIX-EN-PROVENCE

 

LES GRANDES ÉTAPES DE MES CHOIX ET NON CHOIX

ET OÙ EN SUIS-JE MAINTENANT ?

Aix-en-Provence, 22 octobre 2010

 

12 présents

 

J’ai l’impression de n’avoir jamais fait de choix. Comme portées par une vague, les choses se sont faites tout naturellement. Le lycée : pas de choix ; le bac : les langues pour les filles ; suite logique : études de lettres à Montpellier.  J’ai laissé tomber les lettres pour les sciences économiques. J’ai rencontré mon futur mari tout en craignant de nouveau le risque de déception. On s’est marié tout naturellement pour obtenir les papiers nécessaires. J’ai fait de l’enseignement tout comme Maman. J’ai l’impression d’être toujours arrivée là où il le fallait. Maintenant, c’est la retraite. La vie de mes parents s’est déroulée apparemment sans choix. Je suis de la génération charnière entre ceux qui ne choisissaient pas et ceux qui ont pu choisir.

Là où j’ai eu l’impression de choisir dans ma vie, ce fut pour mon service national à Tahiti. Puis, j’ai fait le choix de me marier même si je pense ne pas avoir choisi ma femme. Les enfants furent un non choix. C’était un cadeau pour mon épouse même si j’apprécie beaucoup aujourd’hui. Dans mon boulot, j’ai fait le choix de refuser les déplacements de longue durée, ce qui fut assez structurant et a induit ma première rupture de travail. La conséquence fut de nombreux déménagements et des boulots diversifiés. Un autre choix fut de passer mon brevet de pilote suite à un petit héritage de ma famille. Aujourd’hui, je suis entraîné dans une vie qui coule.

 J’ai suivi l’éducation et la vie qu’ont tracées mes parents. Une première décision importante fut mon mariage afin d’avoir de la liberté. J’ai été obligée d’arrêter mes études suite à la naissance de ma fille. Le chemin a été tracé. J’ai rencontré mon compagnon le plus naturellement du monde, sans le chercher.

 A-t-on vraiment le choix ? À certains moments, on est dans des situations de choix entre deux chemins sur lesquels on s’engage. Arrière grand-père, grand-père et père chimistes, j’étais donc sur les rails pour prendre la suite de Papa. Le mariage est un choix important ; j’ai connu ma première femme à l’école de chimie. L’autre choix a été de quitter mon boulot pour créer une entreprise. Est-on poussé par  l’instinct de survie ? J’ai choisi de rompre d’avec ma femme pour sauver ma peau. Ce fut un moment très difficile : une fois les cartons dans la voiture, je suis parti. Dans une vie, il y a plusieurs vies.

 Est-ce qu’on choisit de naître ? Je n’ai pas été désirée. Ma sœur a été le fruit de l’amour. Un jour, j’ai rêvé de mon père et ma mère qui disaient : « Tu as vu, elle est tout de même jolie notre fille ». J’ai vécu à l’ombre d’une sœur qui était le summum. Cela m’a libérée. À 10 ans, je me suis sortie d’une fièvre typhoïde. Toute petite, je voulais être infirmière.  De santé fragile, on m’a dit « tu seras secrétaire ». Donc secrétaire dans une banque, je déprimais. Puis secrétaire à l’hôpital St Joseph, mais je voulais toujours être infirmière. J’ai bossé pour avoir un diplôme d’État. Je suis tombée malade et ai perdu un œil entrainant une interdiction d’être infirmière sauf en libéral. Mariée puis deux enfants, j’ai voulu beaucoup travailler pour avoir de l’argent pour compenser mes manques de jeunesse. Non choix d’un divorce, puis j’ai rencontré Jésus-Christ. Malade il y a 5 ans, mais ce n’était toujours pas l’heure. Plus je vieillis, moins j’ai de problèmes physiques. J’ai cultivé en moi « Aimer en se détachant », ne pas vouloir prendre. Il y a toujours quelque chose qui vient dans la vie.

 Parcours chaotique. Le choix d’être vétérinaire dans une famille de médecins. À Manosque, la découverte de la nature m’a fait envisager le concours d’ingénieur agricole. Finalement, j’ai fait le choix véto, mais je suis trop sensible par rapport aux animaux qui souffrent. Avec des amis plongeurs, nous rêvions d’être moniteurs de plongée. J’ai alors fait un vrai choix. Club Med  puis magasin de plongée pour me stabiliser, mais mes expériences liées au commerce n’ont pas été très fructueuses d’où mon retour au monitorat : pas vraiment le choix.

 Je suis frappée par ce qui a coulé d’évidence. Enfant, j’étais libre même si on ne me demandait pas vraiment mon avis. Les études obligatoires ont été un non choix et ont généré une vraie coupure à l’âge de 11 ans. Mais il vaut mieux s’adapter ; à nager contre le courant, on s’épuise. J’aurais aimé poursuivre mes études de psycho à Genève, mais mes parents ont déclaré : « Tu es française donc tu restes en France » d’où mon choix de Lettres modernes à Grenoble. Le choix de mon mari s’est imposé d’évidence. En observant mon solitaire, je me suis dit « ça va être beau, mais dur » ! Les enfants ont été les bienvenus et les 2 derniers ont été programmés. Un choix imposé que j’ai accepté naturellement a été de ne pas travailler. Mon choix en arrivant à Aix fut de faire du bénévolat dans une association « Littérature pour la jeunesse » puis je fus happée à l’école de La Nativité pour la catéchèse : un vrai choix et je me suis sentie comme un poisson dans l’eau. J’ai bossé et me suis passionnée. Aujourd’hui, je fais le choix de faire des choses personnelles.

 J’ai compris le thème comme étant « les étapes (le processus) de mes choix ». Je pourrais le symboliser par « non, finalement oui ». Pour les femmes, ça faisait 10 ans que je cherchais et en 2 semaines, il y en a eu deux : sacré choix à faire ! Un jour, je vous parlerai de mon choix de fin de carrière.

 Le choix d’être professeur a été fait sereinement, je m’accommode. Le choix le plus difficile pour moi a été d’avoir ou non un enfant. Mes grossesses ont toujours été des étapes lourdes de ma vie : il m’est difficile de mettre des mots dessus. J’ai quitté mon premier mari pour avorter. Après la naissance de mon dernier enfant, je suis partie me faire stériliser. Je n’ai jamais de remords pour les autres choix, mais pour mes enfants, cela a toujours été difficile : donner la vie est une terrible responsabilité, un poids.

 Mon premier choix s’est fait à 14 ans : c’était ou le collège technique pour devenir électricien ou carrière d’ouvrier agricole ;  ce choix qui m’a fait quitter « mon pays » pour la ville et m’a amené au lycée à Annecy. Après 2 ans d’équivalent IUT, le choix du métier d’ingénieur n’était pas possible par manque de bourse d’études. Un conseil « vous empruntez et vous rembourserez » m’a décidé. Ensuite, j’ai obtenu une bourse pour de la recherche en cryogénie. L’armée à faire, mais j’ai eu l’opportunité de partir aux Kerguelen et ce fut la plus belle année de ma vie. J’ai réfléchi à ce que j’allais faire de ma vie entre une vie de célibataire dans les terres éloignées ou bien fonder une famille. Au retour des Kerguelen, une jeune fille que je connaissais avait bien évolué. Elle a dit oui ! Mon départ pour la Polynésie a été un choix difficile car il s’agissait de travailler pour les essais nucléaires. J’ai dit oui de manière consciente puis je suis retourné à la cryogénie pour rester en famille. Le départ en retraite à 60 ans n’a pas été choisi, mais imposé pour soi-disant embaucher des jeunes.

 Je n’ai pas l’impression d’avoir eu beaucoup de choix à faire. « Toi, tu vas à l’école. » Je me suis trouvée entièrement libre à Paris à 16 ans après une enfance en pension. J’ai eu à faire un premier choix dès ma sortie de l’école d’ingénieur quand mon père m’a proposé un poste à Abidjan, mais j’ai préféré commencer ma carrière petitement et ensuite grimper plutôt que de prendre un poste doré sans rien derrière ? L’Afrique n’était pas mon idéal de vie. Je n’ai pas véritablement choisi de travailler chez Matra, mais ce choix me permettait de m’expatrier pendant quelques mois aux USA. J’ai choisi également de fonder une famille, ce que je n’avais pas eu. Je ne me suis pas posé la question du choix pour la profession, la famille, les enfants. J’ai changé de job uniquement quand j’ai été poussée dehors. Je ne souhaitais pas quitter l’équipe considérée comme une famille. Actuellement, je fais le choix de vouloir m’éclater dans un travail qui m’enthousiasme, mais je ne trouve pas le chemin. Pourtant, je sais que c’est ma voie.

 

Contrairement à mon épouse, ma vie a été faite de choix. Après des études dans une structure familiale modeste j’ai fait l’École normale d’instituteur. (???) Ce fut un enfermement terrible ne correspondant pas à une vocation. J’ai donc fait le choix très important d’abandonner pour étudier l’économie avec une aide du Trésor Public. Puis j’ai fait des études de médecine sous l’impulsion et avec le soutien de mon épouse. J’ai vécu avec une grande liberté de choix, mais avec une analyse plus subtile, ce n’est pas tout à fait vrai. Par exemple, le choix d’aller à Besançon était une façon de survivre en m’éloignant de mes parents.

 Le message d’un absent à la réunion : Si j'avais pu venir, j'aurais cité le mot d'André Gide : « Il faut suivre sa pente, mais en la  remontant », et j'aurais témoigné que j'avais plutôt l'impression de suivre la mienne en descendant, et à reculons.