LES DIFFÉRENTS CERCLES DANS LESQUELS JE VIS (LES GENS !)

Aix-en-Provence, 18 octobre 2007.

10 présents

Vous connaissez mon "historique", mon célibat, ma vie privée, le fait que je suis à la retraite. Je souffre de solitude, je vis en centre-ville, mon ex habite depuis 27 ans dans le jardin avec son ami, et ils vont déménager en Arles. Je me réveille seul dans mon lit, j'ai des angoisses matinales, j'ai peur de mourir seul. Un de mes anciens collègues de Barjols, a été retrouvé mort par terre par la femme de ménage. Je n'ai pas la foi, c'est un problème. Le plus dur dans la vie, c'est ne pas pouvoir aimer quand on a aimé, qu'on a été aimé. Je n'ai pas de relations avec mes anciens collègues de Mignet. En revanche, d'anciens élèves sont contents de me voir. Quel avenir ? Je le vois sombre, je suis un pingouin agnostique. Je viens volontiers aux pingouins et j'ai joué le jeu dès le début, ce n'est pas une confession publique, mais on aborde des sujets intimes. Le cercle de la solitude m'enferme, je ne le mérite pas. Mais j'ai beaucoup de chance avec l'enfant que j’ai adopté.

Mis à part le cercle familial restreint, je limite les échanges avec ma famille et j’évite de voir tous ceux qui peuvent me blesser. J'ai de bons rapports avec mon papa et sa famille, mes cousins. Je classe les parrains et marraines de mes filles dans le cercle des amis. Je ne supporte pas le milieu enseignant. J'aime les pingouins. On cloisonne les cercles quelques fois sans le vouloir.

Le cercle de mon enfance a été mis à mal : pour les copains du village, je suis devenu la grosse tête qui avait épousé une fille de la ville. Mais heureusement ce n'est plus ressenti comme ça maintenant. Plus on vieillit, plus les cercles extérieurs partent, sauf la famille proche. Quand j’étais à Grenoble, avec le frère de ma femme, j'étais le "contrôleur" de 20000 étudiants. Francette était la "femme de Gilbert". En 85 à Cadarache, je suis devenu sur Aix le "mari de Francette". Maintenant, le cercle du boulot a disparu sauf les vrais amis. Je m'occupe de la communauté d'Emmaüs à Cabriès. J'ai encouragé Francette à avoir ses cercles.

Je n'ai pas un besoin viscéral de relations. J'ai une famille rétrécie. Au boulot, je suis conviviale, je suis contente de voir et d'échanger. Il n'y a plus de liens par le biais des enfants. Par paresse, on ne reçoit plus, peur de planifier ? Les cercles fondent, les enfants mènent leur vie, ça ne me dérange pas trop, je manque de disponibilité pour m'investir. J'ai le cercle du tennis avec lequel nous avons partagé des choses fortes. Pour la retraite, ce sera plus dur à gérer.

Il y a les façons dont on gère les cercles. Le cercle de la famille et celui de Manosque Les copains de l'armée : on était un groupe de 4 à 6 personnes et on se revoyait pour des bons repas en Bourgogne. J'ai perdu ce cercle pour des raisons financières. J'aurais pu relancer, mais pourquoi? Avec un ami de Belgique, je partageais la plongée, le vélo et le pilotage. On s’est quitté.  Au bout de 5 ans on s'est revus comme si on s'était quitté la veille. Je ne mélange pas mes cercles amicaux avec celui de la plongée. Je suis très différent en fonction des cercles dans lesquels j'évolue.

Avec mon départ à la retraite, le cercle de mon travail va disparaître, alors que j'ai des relations très intenses avec mes patients. Je ne sais pas comment je vais gérer.

Deux anciens cercles m'intriguent: le parti communiste : j'ai moins de cinq relations avec des anciens. Ça s'est dissout. Peut-être le côté sectaire, un rejet de ma personne car je n’adhère plus aux thèses du parti. L'autre, c'est celui de l'internat de l'école d'instit de mon adolescence. Un lieu d'enfermement.  J'ai retrouvé ces instits. On a refait des repas et les liens se sont renoués tout de suite, alors que j'avais mal vécu cette période.

Le cercle n°1, ce sont les pingouins, sans commentaire. Enfin, non, c'est d'abord la famille réduite à ma femme et mes enfants, puis les pingouins! J'ai le tempérament de me mettre à la marge. Je me rapproche un peu de ma famille malgré une distance. Au travail, je m'entends bien avec les gens, mais je n'ai pas envie de les voir après le boulot. Le groupe des copains de promo était très lié et il s'est disloqué. Le cercle des collectionneurs de bagnoles est à proscrire absolument. Pour les "passionnés de voile", je m'y investirai. Mais pas pour créer une dynamique. Les amis d'enfance, on retrouve un copain et sa femme, ce n'est peut-être pas pour lui mais pour l'époque qu'il me rappelle.

Je ne sais pas par quoi remplacer le cercle boulot quand ce sera fini.

Il y a des cercles que j'ai perdus en tant que femme, celui des études, chez moi au village, l'internat. Le cercle étudiant était très fort au début du mariage, je l'ai perdu, puis retrouvé 25 ans après, lors d'une manifestation. Je n'ai vécu que sur les cercles de Gilbert. Puis nous en avons construit en commun, et chacun de nous en a construit un, lui le boulot, moi sans le travail. Maintenant, les cercles se ferment ou disparaissent, est-ce un bien ou un mal? Quand ma mère est décédée, elle avait d’elle-même abandonné petit à petit des cercles. Je vois que les relations de mes enfants m'échappent.

C'est compliqué de créer des cercles. On a peu d'occasions, quand on change de boulot, quand on est au chômage. J'ai rencontré Scuby qui m'a amené aux pingouins, c'est un autre monde que celui du travail. On a des amis, mais on reçoit peu. Il suffit d'une petite raison pour vite renouer des relations.

Je n'ai pas grand-chose à dire. Petit à petit, les cercles ont disparu, peut-être la maladie, le fait de ne plus avoir de voiture, aussi par ma faute, je ne sais pas.

Il faut s'adapter, ne pas aller en force, accueillir chaque jour ce qui se présente, D'autres valeurs qui arrivent, être bien avec soi-même. Au moindre petit rayon de soleil, tout s'éclaire, il suffit de le voir.

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